mardi 31 mai 2011

Interview d'Arnaud Ventura sur PlaNet Finance et la microfinance

Pour lancer sa rubrique "Acteurs de demain", Opinion-internationale.com a publié un entretien avec Arnaud Ventura, vice-Président du Groupe PlaNet Finance. Celui-ci revient notamment sur les raisons qui l'ont poussé à œuvrer pour la microfinance, sur la création de PlaNet Finance, sur la société d'investissement MicroCred (dont il est le Président) et sur l'avenir de la microfinance. Extraits :

Arnaud Ventura Planet finance microfinance microcred
Sur la découverte de la microfinance et la création de PlaNet Finance

"Lorsque j’étais jeune étudiant, je suis parti aux États-Unis, j’ai travaillé dans le milieu d’internet. A mon retour en France, en 1996, j’ai fait partie de l’équipe qui a lancé Club Internet. J’ai ressenti l’envie de partir à l’étranger, de découvrir le monde. Je suis allé en Thaïlande, j’ai réalisé ce qu’était la pauvreté. J’ai rencontré des membres d’ONG qui faisaient un travail extraordinaire pour soutenir les personnes défavorisées. La problématique a commencé à germer : pourquoi ne pas utiliser les nouvelles technologies pour aider les ONG, en particulier dans le domaine de l’éducation et de la santé, par l’accès à la microfinance et avec les nouvelles technologies.

Après un an chez BNP Paribas en Argentine en 1997, j’ai participé à un Forum Internet présidé par Jacques Attali et à la fin de mon email, je lui ai écrit que j’avais présenté mon projet dans ce domaine. A ma grande surprise, il m’a répondu dans les 24h en me disant qu’il y réfléchissait lui aussi. On s’est rencontrés à Paris en Décembre 1997, j’ai rédigé un business plan et nous avons commencé à travailler ensemble. Nous avons envoyé le projet à Muhammad Yunus, qui quelques mois plus tard était en Europe et décidait avec d’autres parrains de soutenir notre initiative.

Je suis parti au Kenya six mois pour tester nos idées sur le terrain car la microfinance y était déjà pas mal développée. Je suis revenu en France en septembre 1998 car trois mécènes, Michel David-Weill, Benjamin de Rothschild et la banque Dexia avaient accepté de donner 200 000 € chacun pour lancer PlaNet Finance."

Arnaud ventura microcred microfinance
Sur MicroCred

"MicroCred bénéficie à 100.000 personnes en Afrique, au Nigeria, au Sénégal, en Côte-d’Ivoire, à Madagascar et en Chine [...] 50% de nos clients sont des hommes, 50% des femmes, mais PlaNet Finance soutient plus de 400 institutions de microfinance dont la majorité des clients sont des femmes [...] Chez MicroCred, nous avons actuellement 1,1% de personnes qui remboursent en retard de 30 jours. Cela montre combien le modèle est solide."

microcred logo arnaud ventura
Sur l'avenir du monde dans les 10 à 20 ans

"Je suis convaincu que les 4 milliards d’exclus vont être de plus en plus servis par les produits de la microfinance. Cela ne changera pas leur vie immédiatement mais l’accès au secteur financier, comme l’accès à l’éducation et à la santé, permet d’améliorer la vie d’un foyer, d’une famille et de ses enfants. Au delà de la microfinance, il est fondamental pour réduire les inégalités de donner des opportunités à ceux qui en sont exclus. Certains géants de la microfinance, comme BRAC et la Grameen au Bangladesh, développent des actions éducatives et de santé, gèrent des écoles et sont devenus des acteurs globaux du développement. J’espère aussi que les grandes institutions financières comme BNP Paribas ou des multinationales comme Danone, au-delà de leurs engagements sociétaux, recréeront l’ensemble de leur métier à l’aune d’exigences de responsabilité et de partage comme a su le faire la microfinance."

En savoir plus

- Lire l'entretien intégral d'Arnaud Ventura.
- Lire l'article d'Arnaud Ventura publié sur YouPhil : "Muhammad Yunus, victime collatérale de la politique".
- Lire "Microworld : Facebook du microcrédit".
- Site de MicroCred Group.

lundi 30 mai 2011

USAID alloue 12 millions de dollars pour la microfinance au Liban

L’Agence américaine pour le développement international (USAID) a alloué 12 millions de dollars au financement de la seconde phase du projet LIM (Lebanon Investment in Microfinance) qui facilite l'accès des petites entreprises ou agriculteurs au microcrédit.

Lebanon Investment Microfinance LIM Liban
L’objectif de LIM est d’encourager les petites entreprises qui travaillent dans les secteurs de l’agriculture, du tourisme, de l’information et des technologies de communication à développer leurs activités et créer de nouveaux emplois. Cette seconde phase du projet initialement lancé en mai 2009 sera concentrée sur l’aide aux partenaires de l’USAID à accroître leur capital et leur capacité à proposer des prêts.

USAID a d’ores et déjà identifié sept partenaires locaux qui pourraient les aider à répandre les micro-prêts au Liban : L’Association pour le développement durable (ADR) dans le Sud, l’Association d’entraide professionnelle (AEP) à Beyrouth, Al Majmoua à Beyrouth, Ameen à Hazmieh, la Coopérative libanaise pour le développement (CLD) à Zalka, Emkan à Beyrouth et la Fondation Makhzoumi à Beyrouth.

La première phase du projet avait accordé des prêts à plus de 2.200 petites entreprises, créé 3000 emplois, dont un tiers occupés par des femmes.

Source : Le Commerce du Levant

jeudi 26 mai 2011

Etat des lieux de la microfinance en Europe

Le Réseau Européen de la Microfinance (REM) a publié en juin 2010 un état des lieux de la microfinance en Europe : "Overview of the Microcredit Sector in the European Union 2008-2009".

170 organisations de microcrédit dans 21 pays européens y ont répondu. L’enquête montre que le développement des micro-entreprises est le principal objectif des IMF en Europe (70% ont cet objectif), suivi par la création d’emploi (63%), l’inclusion sociale et la réduction de la pauvreté (53%).

Voici quelques conclusions clefs de cette étude.

microfinance europe
Des IMF plus divers en Europe de l'Est

Les acteurs de la microfinance en Europe sont divers. En Europe de l’Ouest on trouve principalement des ONG et des associations. En revanche, en Europe de l’Est, où les IMF peuvent accepter des dépôts, il existe davantage d’organismes à but lucratif (notamment en Bulgarie et en Roumanie), des coopératives, puis des institutions financières non bancaires

Le montant des prêts

Le montant des microcrédits accordés va de 220 euros à 37 000 euros. Les montants ont tendance à être plus élevés en Europe de l’Est, où les institutions de microfinance ciblent davantage les micro-entreprises qu’en Europe de l’Ouest. Le montant moyen des microcrédits en 2009 était de 10.012 euros, contre 11.002 euros en 2007.

Les bénéficiaires cibles en 2009
- 37,7% de femmes
- 32% d'immigrés et de minorités ethniques
- 17,5% de jeunes

Un article détaillé sur le sujet est mis en ligne sur le Portail de la microfinance.
Site du Réseau Européen de la Microfinance (REM)

mercredi 25 mai 2011

Le microcrédit, un instrument du néolibéralisme ?

Jean-Michel Servet est professeur à l’Institut Universitaire d’Études du Développement (IUED) à Genève, directeur de recherche associé à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) et à l’Institut Français de Pondichéry (IFP). En 2006, il a publié Banquiers aux pieds nus, la microfinance (ed. Odile Jacob). S'il défend le microcrédit, Jean-Michel Servat explique ses limites, notamment à cause de sa récupération par les néolibéraux, ce qui empêche de remettre en cause le système économique global.

Jean-michel servet microfinance banquiers pieds nus néolibéralisme

Selon Jean-Michel Servat, pour les néo-libéraux largement séduits par cet outil, le microcrédit est pensé comme une incitation à la mise au travail par l’auto-emploi et comme un moyen particulièrement insidieux de démanteler les politiques d’aide aux chômeurs et aux personnes démunies dans les zones les plus marginalisées.

Dans son numéro de mai/juin 2007, le magazine Valeurs mutualistes a publié un bref entretien avec Jean-Michel Servet.

Votre analyse du microcrédit est plutôt critique…

Le microcrédit est à la fois loué par les partisans de l’économie solidaire et par ceux qui prônent le désengagement de l’Etat ! C’est un instrument du néolibéralisme qui consiste à faire croire qu’il suffit de doter des populations démunies d’un capital économique et financier pour qu’elles puissent se débrouiller. Cela permet très souvent aux États de ne pas penser que la lutte contre la pauvreté passe d’abord par l’éducation, la santé ou la fourniture en réseaux d’eau potable, dont l’absence cause la mort de 4.000 enfants par jour.

Donc, le microcrédit comme alibi de l’économie néolibérale, a encore de beaux jours devant lui ?

Avec le recul de l’idéologie néolibérale, les illusions sont un peu en train de tomber. Dans les pays anglo-saxons et en Suisse, nous commençons à percevoir les limites de ce concept. Je pense qu’il faut chercher les limites du système pour pouvoir l’appliquer à meilleur escient.

vendredi 20 mai 2011

La résistance de la microfinance face aux crises économiques

Dans son étude Microfinance dans les États fragiles. Quelques enseignements de l’expérience de l’AFD, publiée en février 2010, Christine Poursat, consultante en microfinance pour l'Agence Française de Développement (AFD), souligne la résistance de la microfinance aux crises et met en exergue les enseignements tirés par l’AFD concernant la façon dont un bailleur de fonds peut s’impliquer en microfinance dans les États fragiles. Extraits :

microfinance crise economique PlaNet Finance
L’analyse des programmes de microfinance financés par l’AFD dans les États fragiles montre que, dans bien des cas, les institutions de microfinance résistent mieux aux crises ponctuelles ou récurrentes que le reste du secteur financier.

Les IMF gagnent parfois même, à cette occasion, des parts de marché sur les banques. Ce constat corrobore des études plus générales sur la microfinance, visant à comparer l’évolution globale de ce secteur à l’ensemble du secteur financier. Ainsi, une analyse statistique a démontré en 2007 que les IMF résistaient mieux aux chocs économiques globaux que les banques (Gonzales, 2007). Plus récemment, les premières études consécutives à la crise financière mondiale aboutissent au même constat d’une bonne résilience des IMF en comparaison d’autres institutions financières (Lascelles et Mendelson, 2009).

Plusieurs facteurs semblent jouer en faveur des IMF, dans des contextes de crise : la nature court terme des crédits, la souplesse et capacité d’adaptation des institutions, leur capacité à financer des activités diversifiées, leur grande proximité avec la clientèle, leur gestion rigoureuse (souvent supérieure à celle des banques), et surtout peut-être la volonté des clients, élus et salariés de maintenir à tout prix un outil économique indispensable.

En effet, pour la population de ces pays, les IMF sont souvent la seule solution (ou l’une des rares solutions) de financement et de sécurisation de l’épargne. Dans un environnement où la précarité est constante, ces institutions restent présentes et proches des populations, quelles que soient les difficultés, et représentent souvent un refuge. C’est à la fois la bonne gestion et l’intégration réussie de l’IMF dans son milieu qui lui ont permis de résister à la crise.
microfinance crise economique PlaNet Finance Faulu KenyaInstitution de microfinance Faulu au Kenya

Exemples de la résistance de la microfinance aux soubresauts des États fragiles

Congo : les deux premières IMF du pays, Capped et Mucodec, ont réussi, dans un contexte de conflit, à maintenir a minima leurs activités et l’essentiel de leurs actifs alors que les banques commerciales et même la Banque centrale avaient dû fermer.

Comores : le petit réseau des Sanduk d’Anjouan est parvenu à s’autonomiser progressivement, dans un contexte de crises répétées (embargo, sécession de l’île, soulèvements militaires, etc.), grâce au soutien notamment des clients et élus. Ainsi, alors que le poids économique de l’île d’Anjouan a probablement décliné ces dernières années, du fait de troubles politiques et sociaux, le poids économique de ce réseau dans l’ensemble du secteur financier comorien n’a cessé de progresser. Il est passé de 7 % en 2005 à 10 % en 2008 pour l’épargne, et de 8 % à 9 % pour le crédit. Plus largement, IMF et services postaux n’ont cessé de gagner des parts de marché sur les banques.

Kenya
: lors de la crise de 2003-2004, l’IMF Faulu a rapidement vu ses clients, faisant preuve de rigueur dans le suivi des impayés tout en proposant des stratégies financières qui permettaient de reconstituer les fonds propres des clients. Grâce à cette stratégie, une résorption rapide des impayés a été possible. De façon générale, le secteur de la microfinance a très vite surmonté la crise.

Cambodge : au début des années 2000, alors que près de 15 banques classiques avaient été fermées dans un mouvement d’assainissement du secteur financier, les IMF sont apparues comme les institutions financières solides du pays… Les premières d’entre elles étaient déjà institutionnalisées et sous tutelle de la Banque centrale.

Source : Microfinance dans les États fragiles. Quelques enseignements de l’expérience de l’AFD, par Christine Poursat, consultante en microfinance.

jeudi 19 mai 2011

Le Pape Benoît XVI et la microfinance

Au mois de juin 2009, le pape Benoît XVI a publié son encyclique Caritas in Veritate, dans laquelle il évoque à deux reprises le microcrédit et la microfinance. Dans son texte "Pourquoi Benoît XVI parle-t-il de la microfinance dans son encyclique Caritas in Veritate ?", Michel Lelart, directeur de recherche émérite au CNRS, Laboratoire d'économie d'Orléans, explique les raisons qui pousse Benoît XVI à vanter les mérites de la microfinance.

Pape Benoit XVI microfinance Caritas Veritate
D’une part, la microfinance permet de réduire la pauvreté, ce qui est un souci de l’Eglise depuis toujours, comme de développer l’activité à travers l’initiative économique, ce qui est devenue pour elle une préoccupation. D’autre part, la microfinance est un secteur qui respecte la subsidiarité, qui n’est pas étranger au bien commun, et qui s’ouvre à la solidarité, trois des grands principes de la doctrine sociale de l’Eglise. Elle est aussi une finance de proximité, et en cela elle respecte la diversité des cultures comme le Pape le souhaite.

Selon Benoît XVI, la microfinance doit être renforcée et actualisée

Dans le chapitre 4 intitulé "Développement des peuples, droits et devoirs", le Pape affirme que "pour fonctionner correctement, l’économie a besoin de l’éthique". Et il pense que cela est également vrai de la finance qui peut plus facilement s’ouvrir à l’éthique à travers le microcrédit et, plus généralement, la microfinance.

Dans le chapitre 5 consacré à la collaboration de la famille humaine, le Pape passe en revue les domaines où pourrait s’exercer une plus grande solidarité, et il aborde celui de la finance. Elle doit être utilisée de manière éthique, et "il faut qu’elle redevienne un instrument visant à une meilleure production de richesses et au développement… de l’homme et des peuples… le système financier tout entier doit être orienté vers le soutien d’un développement véritable…" Après avoir ainsi réaffirmé le but ultime de la finance, Benoît XVI appelle à des initiatives financières où la dimension humanitaire soit dominante. En évoquant la situation dramatique et le désespoir des couches les plus vulnérables de la population, il rappelle la création des monts de piété et du mouvement coopératif et il souhaite que l’expérience de la microfinance soit "renforcée et actualisée". Il va même jusqu’à dire "il faut que les peuples pauvres apprennent à tirer parti du microcrédit".

Pape Benoit XVI microfinance Caritas Veritate
Introduire le don et la gratuité dans l'économie

Michel Lelart conclut : "la microfinance est simplement évoquées une première fois d’une façon très générale à propos de l’éthique, et une seconde fois à propos de la finance qui doit servir aussi aux populations pauvres ou fragiles. L’encyclique aurait pu nous permettre de voir autrement la microfinance, ou de répondre plus facilement à certaines interrogations relatives par exemple aux "bonnes pratiques", qu’il faudrait susciter ou aux meilleures politiques pour le faire. Il n’en est rien. Elle ne propose aucune recette, elle ne suggère aucune piste, elle ne montre aucune voie. Elle n’a pas à préférer tel type d’institutions, telle taille, telle politique… La seule suggestion qui ressort c’est de commencer à introduire du don et de la gratuité dans ce secteur, où la solidarité est naturelle.

- Pour lire le texte intégral de Michel Lelart, cliquez ici.
- Pour lire l'intégralité de l'encyclique Caritas in Veritate, cliquez ici.

mercredi 18 mai 2011

Vente aux enchères de PlaNet Finance au Festival de Cannes

PlaNet Finance, association de microcrédit fondée par Arnaud Ventura et Jacques Attali, a organisé le 12 mai à Cannes une soirée caritative qui a permis de récolter plus de 300.000 euros. La soirée était animée au Palm Beach par l'actrice Carole Bouquet. Le ticket d'entrée était à 500 euros et la table à 5000. Jusqu'à maintenant, seule l'Amfar (fondation américaine contre le Sida) faisait dans le caritatif durant la Quinzaine à Cannes.

Carole Bouquet lors la vente aux enchères organisée par PlaNet Finance à Cannes © DR.

Parmi les invités de cette vente aux enchères médiatique destinée à faire connaître le microcrédit, on trouvait la nouvelle égérie de l'Oréal, Leïla Bekhti, Luc Besson, Gong Li, Aishwarya Rai ou Pascal Elbé. Selon l'Express, "le lot le plus cher fut un collier Chopard (que Carole Bouquet portait autour du cou et a baladé entre les tables) qui est parti une première fois à 40 000 euros avant d'être remis en vente par son acquéreur puis acheté de nouveau au même prix".

Dans un entretien pour TF1, Carole Bouquet a expliqué son engagement pour PlaNet Finance :
Lien
Je ne suis pas une femme de chiffres mais il faut savoir que 3 milliards de personnes vivent avec moins de deux dollars par jour. Et pour 82%, ce sont des femmes. Or, ces personnes n'ont accès à aucun système de financement alors que lorsqu'on leur prête de l'argent pour un projet, elles sont 96% à rembourser sans délai. Lors de la cérémonie d'ouverture du festival, Bernardo Bertolucci a dédié sa palme d'honneur à ceux qui luttent encore. Il parlait de l'Italie mais je pense que l'on peut élargir ce message à tous ceux qui veulent vivre de manière digne. Il y a un terrible adage qui dit qu'on ne prête qu'aux riches. Et bien, avec Planet Finance, c'est faux. Cette fondation, à travers le microcrédit et de manière très concrète, permet de donner forme aux rêves de millions de personnes. Avec les fonds récoltés ce soir, nous pourrons faire plus.

mardi 17 mai 2011

SKS Microfinance toujours dans la tourmente

Le titre SKS Microfinance, le plus gros acteur du secteur en Inde et le seul coté, est tombé en début de semaine dernière à 269 roupies (4,2 euros), contre 442 roupies une semaine plus tôt. Fin septembre 2010, l'action valait 1.490 roupies à Bombay, à son plus haut après une introduction en Bourse triomphale réalisée fin août à 1.088 roupies... Même si le titre s'est repris à 379 roupies vendredi dernier, la chute est spectaculaire.

SKS microfinance indiaLien
L'effondrement de la semaine dernière tient à l'annonce d'une perte de 11 millions d'euros au premier trimestre 2011, contre un bénéfice de 9,8 millions un an plus tôt. Sur la même période, le chiffre d'affaires a chuté de 39 % et les provisions ont été multipliées par sept. Dans la foulée, JP Morgan et Credit Suisse ont émis de sombres prévisions sur la firme.

Ces chiffres reflètent l'impact de la crise dans laquelle est plongé le secteur depuis l'automne, quand l'Andhra Pradesh, un gros État indien où la microfinance est particulièrement développée, a lancé une offensive contre ces établissements financiers qui prêtent des sommes de quelques dizaines ou quelques centaines d'euros aux plus pauvres. Les MFI (institutions de microfinance), estiment les autorités de l'Etat, prêtent à des taux usuraires, empilent les prêts à des ménages insolvables et poussent au suicide les malheureux incapables de rembourser. L’État a donc imposé une batterie de contraintes aux MFI qui a quasiment paralysé leur activité. Seulement 10 à 15 % des crédits en cours seraient actuellement remboursés par les emprunteurs.

Nouvel encadrement

Cette nouvelle crise intervient alors que la banque centrale indienne vient d'adopter des règles encadrant les MFI moins sévères que prévu. Par exemple, elle a décidé que les taux d'intérêt des microcrédits ne devraient pas dépasser 26 %, au lieu des 24 % envisagés. Elle a également réaffirmé que la microfinance faisait partie des « secteurs prioritaires » de l'économie, ce qui devrait faciliter la reprise de son financement par les banques, gelé depuis l'automne. Mais il faudra davantage d'efforts encore aux MFI pour surmonter la crise. Alors qu'une vague de consolidation est attendue, SKS Microfinance a annoncé vouloir lever de nouveaux capitaux et diversifier ses activités.

Sources : Les Échos

lundi 16 mai 2011

L'avis d'Oxus Development Network sur la microfinance

Dans son magazine du 12 mai, AGEFI-Hebdo a consacré une enquête à la microfinance. On y trouve notamment un entretien avec Michaël Knaute, directeur général d'Oxus Development Network, réseau d'institutions de microfinance, créé par ACTED en 2005. Michaël Knaute parle de la crise qui a touché la microfinance ces dernières années, de l'évolution vers une microfinance responsable et de la notoriété de la microfinance en France.

Michaël Knaute microfinance Oxus Development NetworkMichaël Knaute, directeur général d'Oxus Development Network.

Quelles sont les causes de la crise du microcrédit ?

Le microcrédit connaît des crises locales qui ont des causes différentes, mais dont le point commun est le surendettement, conséquence d'une croissance non maîtrisée, d'une recherche excessive de gain et d'une concentration trop forte des institutions de microfinance sur certaines zones ou sur certaines clientèles. Ce sont de vrais problèmes de pratiques de la microfinance mais qui accompagnent parfois des mouvements sociétaux comme l'entrée dans la société de consommation : en Inde, par exemple, certains microcrédits ont été octroyés pour acquérir des biens de consommation. L'impossibilité de les rembourser est alors un dommage collatéral de la modernisation du pays. Ce type de crise peut très bien se reproduire ailleurs.

Peut-on prévenir ce risque ?

C'est l'objet de L'Appel de Paris pour une microfinance responsable lancé lors du forum Convergences 2015 qui s'est tenu à Paris du 3 au 5 mai. Ce sont des principes fondamentaux visant une évolution positive de la microfinance. Il s'agit de mieux réguler et de mieux superviser les institutions de microfinance, d'améliorer la transparence sur leur performance sociale à l'aide de ratings sociaux et d'indicateurs internes, de mieux protéger les clients en renforçant l'éducation et l'accompagnement. Il faut également responsabiliser les investisseurs qui doivent modérer leurs exigences de retour sur investissement et garder à l'esprit la dimension sociale du projet. Enfin, la microfinance doit se développer à l'aide d'autres produits que le crédit comme l'épargne, l'assurance et le transfert de fonds qui sont de bons moyens de lutte contre la pauvreté.

L'image du microcrédit s'est-elle détériorée ?

Selon notre sondage Ipsos réalisé en mars 2011, la notoriété et l'image du microcrédit s'améliorent auprès du grand public : 80 % des Français en ont entendu parler et 72 % pensent que c'est une solution innovante pour lutter contre la pauvreté. En outre, les 18 investisseurs français du microcrédit ont investi 541 millions d'euros en 2010, soit 34 % de plus qu'en 2009, preuve que le microcrédit est toujours attractif.

Lien vers le numéro de l'AGEFI du 12 mai 2011.

jeudi 12 mai 2011

Arnaud Poissonnier et le microcrédit en Tunisie

Arnaud Poissonnier, fondateur du site de microcrédit en ligne Babyloan, vient de publier sur son blog une tribune sur les possibilités de développement du microcrédit en Tunisie. Son titre : "Le microcrédit au chevet de la Tunisie ?". Face aux difficultés sociales et économiques que traversent actuellement la Tunisie, Arnaud Poissonnier estime que le microcrédit est un des outils à actionner, même si "il serait suicidaire de considérer la microfinance comme LE remède absolu contre le chômage et, partant de ce postulat, de vouloir la laisser se développer de manière trop large et trop sauvage".

Arnaud Poissonnier Babyloan microcrédit microfinance
Des institutions de microfinance existent déjà en Tunisie

Arnaud Poissonnier rappelle que le microcrédit n'est pas inconnu en Tunisie. Cependant, à l'exception de deux acteurs principaux, il est moins développée que dans d'autres pays :
Enda Inter-Arabe déploie ses programmes de microcrédit dans tout le pays depuis 16 années. Cette remarquable institution de microfinance fait même partie des cent plus importantes au monde avec plus de 160.000 clients et un portefeuille de 40 millions de dollars. Un deuxième acteur, étatique celui-là, la Banque Tunisienne de Solidarité, développe également des activités dans le pays et un appel vient d’ailleurs d’être lancé pour pourvoir à son redressement. Au-delà de ces deux acteurs et d’une quantité de micro intervenants, le secteur de la microfinance ne s’est cependant pas développée en Tunisie autant que dans certains autres pays où des réglementations souvent libérales lui ont permis une diffusion plus large. Il ne répond donc pas à l’ensemble des besoins de ceux qui se sentent capables de lancer leur propre activité d’auto subsistance.

Enda inter arabe tunisie microfinanceEnda Inter-Arabe contribue au développement économique de Tunisie depuis 1995.

Augmenter le nombre de bénéficiaires du microcrédit

Pour augmenter le nombre de bénéficiaires du microcrédit, il faut que le gouvernement définisse le futur cadre légal de l’activité des institutions de microfinance. Une commission de travail vient d'ailleurs d’être constituée, à l’initiative du ministère des Finances. Pour l'instant, environ 300.000 Tunisiens bénéficient du microcrédit :
Sur une population de 10 millions d’habitants, on nous annonce un potentiel de bénéficiaires de microcrédits de l’ordre de 10% de la population, soit 1 million de personnes, alors qu’ils ne sont qu’un peu plus de 300.000 à pouvoir en bénéficier actuellement. Ce chiffre symbolique est sans doute un peu généreux et les approches mécaniques de ce type ont souvent montré leurs limites par le passé. Il paraît plus raisonnable de compter sur une population cible de l’ordre 600 et 700.000 clients potentiels, c’est à dire 300 à 400.000 de plus qu’actuellement. Sur la base d’un tel objectif, le microcrédit permettrait de traiter environ 10% de la problématique du chômage et de l’exclusion dans le pays, ce qui n’est pas neutre.

Lire l'intégralité de la tribune : "Le microcrédit au chevet de la Tunisie ?"

A propos d'Arnaud Poissonnier

Après 12 années passées dans l’univers des banques de gestion de fortunes, Arnaud Poissonnier se reconvertit à la microfinance en 2005. Il se consacre dans un premier temps au développement d’OXUS Microfinance, le réseau d’institutions de microfinance de l’ONG ACTED avant de découvrir aux États-Unis les précurseurs du prêt bancaire en ligne. En février 2008, il crée avec Aurélie Duthoit le site de microcrédit en ligne Babyloan.org.

mercredi 11 mai 2011

Ouverture d'une microfinance Conadie au Cameroun

A Edéa au Cameroun, le préfet Aurélien Sandjo a inauguré le 3 mai l'ouverture officielle de l'agence Conadie (Compagnie nationale pour le développement de l’initiative économique), un établissement de microfinance de 2ème catégorie agréé par le ministère des Finances. Il s'agit d'une société anonyme au capital de 100 millions de FCFA (soit 152.000 euros). La Conadie a été créée en avril 2007 à Douala, après une période de gestation qui a duré pendant cinq ans.

microfinance afrique cameroun conadie
Dans son discours, Ernest Massena Ngalle Bibehe, Président du conseil d'administration de la Conadie, a indiqué la stratégie de mise en œuvre de ses opérations :
1) mettre à la disposition de la clientèle une large gamme des produits et services financiers : l’épargne, le crédit, le transfert de fonds et, bientôt, la micro-assurance ;
2) introduire une méthodologie de crédit qui évalue la volonté et la capacité de remboursement basée sur l’élaboration des états financiers et le calcul de l’excédent du ménage plutôt que sur la garantie en espèce ou matérielle classique proposée par l’emprunteur.
3) former le personnel de direction basée à Douala, et celui des agences pour leur permettre de développer des relations commerciales étroites et personnalisées avec la clientèle et d’accroître la productivité de l’établissement.
4) décentraliser l’offre des produits et services à travers le développement d’un réseau d’agences et de points de service situés dans des zones à forte concentration d’activités du secteur informel, surtout de petites micro-entreprises ;
5) Centraliser les opérations et le système d’information et de communication pour réduire des coûts opérationnels et rendre l’établissement plus efficient.

Pour en savoir plus, lire l'entretien avec Lydienne Mouloby, directrice générale de la Conadie.

Source : La Nouvelle Expression.

mardi 10 mai 2011

Paul Loridant défend la microfinance en France

Le 4 mai, à Limoges, dans le Limousin, Paul Loridant a animé au Conseil régional une conférence sur le thème de "la microfinance en France, facteur d'inclusion bancaire, professionnelle et sociale ?". Sénateur de l'Essonne de 1986 à 2004, Paul Loridant est actuellement conseiller du Gouverneur pour les relations territoriales et secrétaire général de l'Observatoire de la microfinance. L'Observatoire de la Microfinance, institué par le Gouverneur de la Banque de France en 2006 a pour mission de développer la connaissance des opérations de microcrédit. A l'occasion de cette conférence à Limoges, Paul Loridant s'est entretenu sur la microfinance avec le quotidien régional Le Populaire.

Paul Loridant observatoire microfinance
Que regroupe le terme de microfinance ?

Elle regroupe trois choses : le microcrédit, la microassurance et l'épargne solidaire.

Le microcrédit est-il, selon vous, un outil de développement économique et social ?

Oui, pour le microcrédit professionnel, qui existe depuis plus de 20 ans. Il permet à des personnes à faibles ressources, porteuses d'un projet personnel, de bénéficier de prêts que leur refuse le système bancaire traditionnel. En 2010, malgré une petite baisse, ce sont près de 15.000 personnes qui ont bénéficié d'un microcrédit. Il y a aussi le microcrédit personnel, mis en place après la loi de cohésion sociale mise en place en 2006. Il est réservé à des personnes exclues du système bancaire et qui ne peuvent pas avoir de prêt. Sa vocation est de favoriser l'inclusion sociale ou l'insertion professionnelle. En 2010, il y a en a eu 8.000 en France.

La microassurance semble plus embryonnaire. Est-ce qu'elle fonctionne ?

Oui. Il y a, depuis trois ans, plusieurs milliers de contrats de microassurance en France. Ils permettent aux créateurs de microentreprises de s'assurer à un coût modique pour des garanties de risques professionnels limitées à quelques milliers d'euros et pour une durée limitée à quelques années.
Source : Le Populaire.

lundi 9 mai 2011

Microworld : "Facebook du microcrédit"

La Croix a publié un article sur la plateforme de microcrédit en ligne MicroWorld, filiale de PlaNet Finance, groupe créé en 1998 par Jacques Attali et Arnaud Ventura. Microworld, dont le site est actif depuis février dernier, propose aux internautes de financer en ligne des microentrepreneurs du monde entier. Fin mars, plus de 150 projets avaient été financés, à raison de 46 € en moyenne par prêteur. Ce système de microcrédit en ligne est déjà développé aux Etats-Unis par Kiva et MicroPlace, et en France par Babyloan.

Microworld microfinance PlaNet Finance David Langlois
Le Facebook du microcrédit

David Langlois, directeur général de MicroWorld, explique : "MicroWorld est un peu le Facebook du microcrédit. En investissant 20 € au minimum sur notre site Internet, on peut financer une micro-entreprise [...]Il ne s’agit pas d’un don, mais d’une sorte de prêt à taux zéro. Les emprunteurs obtiendront le remboursement de la mise initiale dès que la micro-entreprise sera à l’équilibre. Mais ils abandonnent leurs actions à une ONG, PlaNet Finance, qui en est le bénéficiaire direct".

Arnaud Ventura, vice-président de PlaNet Finance, ajoute : "la plupart de nos emprunteurs ont déjà une petite activité. Ils sollicitent un prêt pour la développer, complète . De notre côté, nous assurons un suivi, par l’intermédiaire de nos partenaires locaux, pour s’assurer de la bonne utilisation de l’argent [...] On peut changer le monde, si on arrive à faire connaître la microfinance [...] Il faut sortir de la communication fleur bleue autour du microcrédit, parler de ses dérives, le désacraliser pour en faire une activité normale".

Pour en savoir plus

- Lire en intégralité l'article de La Croix.
- Site de MicroWorld
- Interview d'Arnaud Ventura sur la microfinance.

vendredi 6 mai 2011

Vote d'une loi sur la microfinance en RDC

Les députés de la République Démocratique du Congo ont voté, au cours de la séance plénière du 3 mai, la proposition de loi sur la microfinance qui était sous examen. Cette proposition de loi était initiée par le député national Hubert Masala.

Republique democratique congo microfinance
Votée par 283 députés sur les 500 que compte la chambre basse du Parlement et envoyée au Sénat pour une seconde lecture, la loi sur la microfinance va contribuer, selon son initiateur, à la baisse du taux de la thésaurisation de la monnaie, l'accès au système d'épargne et de crédit par les couches sociales rurales les plus pauvres, la déconcentration et l'extension géographique de la bancarisation, le drainage de la quasi-totalité de la monnaie dans le circuit bancaire.

Elle va aussi permettre l'accroissement et la diversification des investissements sur l'ensemble du territoire national à la faveur du crédit qui deviendra plus accessible à tous, l'augmentation du PIB par l'augmentation et la diversification des investissements, la maîtrise et le raffermissement du taux de change de la monnaie nationale et l'augmentation induite du pouvoir d'achat de la population, et l'appui indispensable à la décentralisation politico-administrative A la suite de la déconcentration financière que devra susciter sa promotion.

Source : Digitalcongo.net.

jeudi 5 mai 2011

Michel Barnier en faveur du microcrédit

A l'occasion de la publication du Baromètre 2011 de la microfinance en France, Michel Barnier, Commissaire européen au Marché intérieur et aux Services, a donné son avis sur la microcrédit. Michel Barnier souhaite "que le rôle important que le microcrédit peut jouer en tant que nouveau levier de croissance soit reconnu le plus largement possible". Il compte d'ailleurs aborder ce sujet le 18 novembre 2011, lors qu'une conférence qu'il organise à Bruxelles sur le thème de l’entrepreneuriat social.

Michel Barnier microcredit microfinance
Quelle est votre opinion sur le microcrédit en tant qu’outil d’insertion et de création d’entreprise ?

Je suis effectivement convaincu que le microcrédit peut jouer un rôle important dans ces deux domaines qui sont d’ailleurs pour moi complémentaires. En cette période où nous recherchons assidûment les moyens de retrouver de la croissance pour créer de nouveaux emplois, l’initiative individuelle doit être stimulée à tout prix. Il existe un potentiel important de créativité chez de nombreuses femmes et hommes que la crise a exclus du marché du travail. En leur donnant les moyens de réaliser leur projet, si modeste soit-il, le microcrédit va non seulement les rétablir dans leur dignité individuelle, mais également créer de l’activité économique au bénéfice de la société toute entière.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les mesures prises au plan européen en faveur du développement du microcrédit ?

L’Europe est effectivement présente dans ce domaine. Cette action prend des formes diverses. Par exemple, le programme-cadre pour la compétitivité et l’innovation, qui à la Commission européenne est placé sous la responsabilité du Vice-président Tajani, accorde des garanties financières aux organismes nationaux de microfinance (telle que l’Adie en France). Dans le cadre de notre politique régionale (Commissaire Hahn), le programme JEREMIE permet aux États membres d’utiliser une partie des fonds de développement régionaux pour apporter une aide financière à de petites PME. Je citerais également le programme JASMINE qui apporte une assistance technique aux organismes de microfinance, ou encore le programme PROGRESS Microfinancement (Commissaire Andor) qui vise plus particulièrement l’assistance à des microentreprises créées par des chômeurs.

Toutes ces actions tendent vers un objectif commun, qui est de permettre à ces milliers d’hommes et de femmes qui ont des idées et qui souhaitent s’en sortir, de réaliser leur projet.

L’Europe à un rôle à jouer pour stimuler les initiatives prises par les États membres ou diffuser les bonnes pratiques. D’une manière générale, je plaiderais pour que le rôle important que le microcrédit peut jouer en tant que nouveau levier de croissance soit reconnu le plus largement possible. Je n’exclus pas non plus, si nécessaire, qu’il faille mener d’autres actions au plan européen, notamment dans le domaine du marché unique qui relève de mon portefeuille.

Faut-il, par exemple, prendre des mesures sur le plan juridique permettant aux organismes de microfinance d’agir plus facilement sur le territoire des 27 États membres ? C’est une question qui mérite d’être posée. Comme vous le savez sans doute, la Commission prépare une initiative majeure pour la relance du marché unique. Il s’agit de l’Acte pour le marché unique que la Commission devrait adopter en avril. Je me suis battu pour que ce document reconnaisse l’idée selon laquelle une telle relance du marché unique ne sera possible que si nous arrivons à trouver les moyens de prendre en compte les intérêts des citoyens européens et de répondre à leurs besoins réels et quotidiens. Je conçois le marché unique comme un outil essentiel pour la mise en œuvre du Traité de Lisbonne qui est la mise en place d’une économie sociale de marché hautement compétitive. Nous n’y parviendrons qu’en remettant le citoyen au cœur de nos préoccupations.

Pour moi, chaque citoyen compte. Chaque citoyen est un entrepreneur potentiel. La microfinance peut nous aider à transformer ce potentiel en réalité. Je compte d’ailleurs inscrire cette question parmi les sujets traités à l’occasion de la conférence que j’organiserai à Bruxelles sur le thème de l’entrepreneuriat social le 18 novembre 2011.

Michel Barnier microcredit microfinance
Quelles actions entendez-vous mener pour soutenir l’économie sociale de manière plus générale en Europe ?

Comme je l’ai indiqué, le développement de l’entrepreneuriat social devra, pour moi, constituer un pilier essentiel de la prochaine relance du marché unique. La consultation que nous avons lancée en octobre 2010 sur ce que devrait être le contenu d’une telle relance a montré un très large soutien à l’égard de cette approche, voire un réel enthousiasme, notamment des ONG, des citoyens et de quelques États membres.

Plusieurs actions pourraient être menées dans ce domaine. J’envisage par exemple, la mise en place, au plan européen, de mécanismes de labellisation sociale, éthique ou environnementale des entreprises. Je souhaite également proposer la création d’un régime facilitant le développement de fonds d’investissement qui se spécialiseraient dans ce type d’actifs. Des actions pourraient également être menées pour faciliter l’activité des fondations au plan européen, ou encore pour améliorer la gouvernance des entreprises pour les orienter davantage vers des pratiques plus respectueuses du développement social ou de l’environnement.

Comme vous le voyez, les idées ne manquent pas. Les réflexions que nous menons au sein de la Commission visent à les mettre en cohérence. Je souhaite qu’au cours des prochains moi nous identifiions plus précisément ce qui pourra être fait au niveau européen dans ce domaine assez nouveau.

Vous pouvez en tout cas compter sur la détermination pour veiller à ce que l’Europe montre l’exemple dans ce domaine, comme dans d’autres !

mercredi 4 mai 2011

Les Français plébiscitent le microcrédit

Selon une enquête réalisée par Ipsos/Logica Business Consulting pour le Baromètre de la microfinance 2011, 76 % des français jugent que le microcrédit responsabilise ses bénéficiaires en leur donnant les moyens de subvenir eux-mêmes à leurs besoins. L'an dernier, cette proportion n'était que de 70 %.

Dans le même temps, les personnes interrogées s'inquiètent moins des risques liés à ce système de petits prêts : 47 % des personnes interrogées, contre 50 % l'an dernier, estiment que c'est une solution risquée car elle consiste à prêter à des personnes non solvables. L'octroi de microcrédit est perçu comme d'autant plus nécessaire que six Français sur dix estiment qu'ils ne pourraient pas eux-mêmes obtenir de crédit classique pour créer une activité en France.

Enfin, un Français sur cinq serait prêt à faire un don à un organisme de microcrédit.

Lire l'intégralité du Baromètre de la microfinance 2011.

mardi 3 mai 2011

Appel de Paris pour une microfinance responsable

A l'occasion du forum Convergence 2015, organisé à Paris du 3 au 5 mai, Le Monde a publié une tribune collective intitulée "Appel de Paris pour une microfinance responsable". Dans ce texte très long, expliquant le développement de microfinance, son rôle dans la lutte contre la pauvreté, ses limites, ses excès et son traitement médiatico-politique erroné, les auteurs dressent en 6 points les orientations souhaitables pour une microfinance responsable.


Voici le résumé de ces 6 points :

1. Le modèle économique de la microfinance répond à un double objectif à long terme d'impact social et de viabilité financière.

2. Les institutions de microfinance ne peuvent inscrire leur développement dans une perspective durable qu'en inspirant confiance par une gouvernance solide, des règles prudentielles robustes et des systèmes efficients de reporting, de contrôle et d'audit.

3. L'information et la protection des clients, la prévention du surendettement, la transparence des taux et tarifs pratiqués, les procédures de mise en jeu des garanties et de recouvrement, les politiques d'incitation des agents de crédit doivent pleinement respecter la vocation première de la microfinance, basée sur une relation de confiance et de respect du client.

4. Les investisseurs internationaux, publics et privés, spécialisés en microfinance, ont le devoir d'agir dans le respect des intérêts à long terme des institutions qu'ils accompagnent et se donner pour objectif leur autonomie financière.

5. Les chercheurs et les milieux académiques sont invités à intensifier leur dialogue avec le secteur de la microfinance pour réaliser des études d'impact objectives, en tenant compte de la diversité des contextes locaux, et à en diffuser largement les conclusions.

6. Les bailleurs de fonds et les grandes fondations privées ont un rôle essentiel à jouer pour promouvoir les bonnes pratiques et encourager l'innovation et la diversification en microfinance. Les bailleurs de fonds sont également invités à amplifier leur effort d'encouragement à la conception et la diffusion de systèmes de micro-assurance adaptés, en particulier dans les domaines de la santé et de l'agriculture.

Lire l'intégralité de l'Appel de Paris pour une microfinance responsable.

lundi 2 mai 2011

La semaine française de Muhammad Yunus

A l'occasion de la publication de son livre "Pour une économie plus humaine. Construire le social-business", Muhammad Yunus a passé plusieurs jours en France pour en faire la promotion, donner des entretiens sur la microfinance et participer à un colloque sur le social business. Parmi les exemples de social business, Muhammad Yunus cite des projets portés par des multinationales : ainsi, le joint-venture Danone-Grameen pour créer un yaourt enrichi en nutriments destiné aux enfants du Bangladesh ; le joint-venture entre l'ONG Cure 2 Children et le Grameen Healthcare Trust, destiné à soigner la thalassémie, ; ou encore le projet Grameen Veolia Water, permettant de distribuer de l'eau potable à un village au Bangladesh.

Muhammad Yunus France Social Business
Rencontre avec Christine Lagarde

La ministre de l'Économie française, Christine Lagarde, a rencontré le 26 avril le professeur Muhammad Yunus. A cette occasion, Christine Lagarde a "exprimé le souhait qu'une solution au différend actuel entre les autorités du Bangladesh et le professeur Muhammad Yunus puisse être trouvé dans le respect des institutions du Bangladesh et dans l'intérêt de toutes les parties".

La distribution de l'eau potable en partenariat avec Veolia Water

Lors d'une conférence sur le social business organisée le 27 avril au Conseil économique, social et environnemental (CESE) par Antoine Frérot, PDG de Veolia Environnement, Muhammed Yunus a expliqué l'intérêt de son partenariat avec Veolia pour approvisionner en eau potable une zone rurale du Bangladesh. En effet, explique Novethic, c'est avec Veolia que la Grameen Bank a crée une filiale, la Grameen-Veolia Water, dont l'objectif est de fournir de l'eau potable aux populations les plus pauvres dans une zone rurale du Bangladesh. Inaugurée le 24 juin 2009, l’usine de production et de traitement d’eau, située à une centaine de kilomètres de Dacca, la capitale, permet d’alimenter une dizaine de bornes-fontaines situées aux alentours. Chaque foyer peut acheter jusqu'à 30 litres d'eau potable par jour à un prix modique : de 0,2 à 0,5 centime d'euros par litre, selon la distance de la borne à l'usine. Soit 100 fois moins que l’eau en bouteille vendue localement…L’investissement, de l’ordre de 500 000 euros, doit permettre d’alimenter à terme 40 000 habitants en eau potable".

Grameen Veolia Water
Muhammad Yunus explique comment une multinationale peut évoluer vers le social bussiness, chose difficile à comprendre à première vue : "nous n’avons pas de solution toute faite ni duplicable. Pour l’instant, c’est un processus d’expérimentation qui implique d’être indépendant des grandes institutions internationales comme des marchés financiers. Le crédo, c’est « pas de pertes, pas de dividendes ». Il faut donc sortir, mentalement, des cadres habituels du business".

Comme le résume Michel Rocard, présent au colloque organisé par le CESE, "le social business, c'est la logique d'économie marchande et capitaliste mais sans la distribution de dividendes". Pour l'ancien premier ministre, ce modèle est la preuve que "l'on peut vivre dans une économie de marché de manière non cupide".

Les médias parlent de la microfinance

L'occasion de la venue de Muhammad Yunus en France a été également été l'occasion pour la presse de parler de la microfinance. Dans une tribune pour YouPhil, intitulée "Muhammad Yunus, victime collatérale de la politique", Arnaud Ventura, vice-Président de PlaNet Finance (dont Yunus est le Président d'honneur), est revenu sur "l'affaire Yunus" qui est utilisée depuis plusieurs mois pour discréditer la microfinance et la Grameen Bank. Arnaud Ventura rappelle donc que :
La Grameen Bank a plus de 8 millions de clients. Ces clients améliorent chaque jour leur niveau de vie. Ils sont reconnaissants envers le Pr. Yunus. Avec leur famille, ce sont ainsi près de 40 millions de personnes sur lesquels la Grameen Bank a une influence directe.

Arnaud Ventura PlaNet Finance mobile banking
Arnaud Ventura explique également la mauvaise utilisation de la microfinance par les politiques. Ainsi :
Dans de trop nombreux pays, comme ce fut le cas en 2006 en Afrique, les candidats à la présidence sont élus en promettant aux emprunteurs qu’ils n’auront pas à rembourser leurs prêts. Ces promesses électorales, si elles permettent à certains de se faire élire, ont le défaut de ruiner les efforts de centaines de petites banques de microfinance qui ne peuvent que s’effondrer une fois les élections passées, les clients ne remboursant plus.

Dans bien des pays, les hommes politiques au pouvoir créent leurs propres programmes de microfinance, en réalité des programmes de crédits subventionnés dont l’objet est finalement d’encourager les clients à maintenir au pouvoir les politiques leur octroyant des crédits. Ce fut le cas en son temps dans la Tunisie de Ben Ali, c’est encore le cas en Algérie ou la microfinance est publique, mais aussi dans de nombreuses villes du Mexique, d’Amérique Latine et d’Afrique ou les mairies gèrent directement des programmes de microfinance…

Dans un entretien pour Le Figaro, Muhammad Yunus explique la genèse et l'évolution de la Grameen Bank :
Nous avons commencé avec des prêts de 30 ou 40 dollars. Aujourd'hui nous prêtons plus de 125 millions de dollars chaque mois avec une moyenne de 200 dollars par prêt. Avec 200 dollars, on ne démarre pas une entreprise, mais on élève des poulets dont on vend les œufs, des vaches dont on vend le lait. Et à présent nous avons affaire à une seconde génération d'emprunteurs. Contrairement à leurs parents qui étaient illettrés, ils sont allés à l'école et peuvent beaucoup plus facilement créer de vrais emplois, une petite société. Nous les encourageons à le faire et nous leur disons : “embauchez d'autres jeunes comme vous”.»

Ci-dessous, un entretien vidéo de Muhammad Yunus pour YouPhil.



Ci-dessous un entretien avec Muhammad Yunus pour France Culture.